Un mois après, je reviens enfin sur le Val Foncine Trail. C’était la dernière grosse épreuve de ma saison de trail, peut-être la plus difficile aussi, et il me tenait à cœur de vous raconter ma course. Cela devient une tradition avec Guillaume, mais nous aimons bien commencer nos vacances par une petite compétition. L’année dernière, nous avions choisi le Trail de l’Aigle en Haute Savoie. Cette année, direction le Jura pour affronter pour la première fois la distance de 35 kilomètres, avec 1400 mètres de dénivelé !
Quelques mots sur la course
Le trail de Val Foncine se déroule sur deux jours : une épreuve de 11 kilomètres le samedi et deux épreuves de 35 et 18 kilomètres (en duo pour cette dernière) le dimanche. Au total, ce sont 800 dossards vendus et une centaine de bénévoles qu’il faudra compter pour tout organiser.
Les parcours passent par trois villages et emmènent les coureurs entre forêts et montagnes. Il y a deux points ravitaillement pour l’épreuve de 35 kilomètres, et un repas complet est prévu à l’arrivée.
J’y ai vu une belle occasion de découvrir la région, que je ne connais pas du tout, tout en prenant du plaisir sur des chemins vallonnés.
Compte-rendu
Nous prenons la route pour le Jura le samedi 21 juillet. Il est tombé d’impressionnants orages de grêle la veille, mais il ne reste plus trace des intempéries au moment de notre arrivée. Seules se présentent à nous des routes bordées de forêts, encore humides et peu fréquentées.
Le réveil sonne aux aurores le dimanche. Après avoir avalé notre petit déjeuner habituel, nous quittons silencieusement notre Air BnB au petit matin. Les paysages sont enveloppés par la brume et le soleil commence à peine à se lever sur les villages endormis. C’est tellement joli que j’hésite à m’arrêter prendre des photos. Mais nous ne sommes pas en avance, et il nous reste nos dossards à récupérer.
Les parkings ne sont pas très bien indiqués, mais nous finissons par garer la voiture non loin du départ. Comme souvent sur les petites courses, le retrait du sac ne prend que quelques minutes. Le temps d’épingler le dossard et de réveiller nos jambes paresseuses, le soleil est déjà haut dans le ciel. La journée promet d’être très belle et j’ai hâte de plonger au cœur des montagnes.
Je me place derrière l’arche du départ. Nous ne sommes pas très nombreux et je ne croise pas non plus beaucoup de femmes. Le trail reste encore une discipline très masculine, surtout dès que la distance commence à augmenter un peu. L’ambiance est bonne, le photographe nous fait poser… Je suis sereine. Enfin, le départ est lancé !
Le premier kilomètre serpente dans le village de Foncine-le-Haut et nous quittons rapidement la route pour découvrir les premiers sentiers. Les passages sont étroits et la première grimpette nous impose la file indienne. Méthodiquement, j’emprunte les pas des coureurs devant moi. Pourtant, quelque chose ne va pas. Je sens que mon cœur s’emballe et que mon souffle s’accélère plus que de raison. Je veux me ralentir, calmer ma respiration… Mais j’ai l’impression de fournir un effort un peu trop intense pour un début de course. Tant pis, j’essaie de contrôler les dégâts et je commence à prendre ma place parmi les coureurs. Je ne suis entourée que d’hommes. Certains sont partis trop vite et je les double déjà.
Après environ 5-6 kilomètres de course, je commence enfin à trouver mon allure. La première ascension jusqu’au Mont Bulay est terminée. Je ne suis plus essoufflée et je peux enfin me fier à mes sensations. Les paysages sont très beaux. Nous sommes entourés de montagnes et de forêts et je ressens encore une fois cette vague de joie qui m’envahit à chaque fois que je cours dans un endroit privilégié. Je déroule tranquillement, et je continue même à doubler quelques petits groupes.
Étonnamment, je me fais rattraper en descente. C’est pourtant la partie que je préfère – et c’est normalement à ce moment que je grappille quelques places. Pendant cette course, c’est tout l’inverse ! Cela me fait presque plaisir, d’ailleurs. Je sais que ma technique de grimpe s’est bien améliorée depuis l’année dernière et j’arrive à mieux encaisser de longues ascensions.
C’est vers le 10 ème kilomètre que j’aperçois enfin une autre fille. T-shirt rouge, queue de cheval blonde qui se balance en rythme… Je n’ai pas de mal à la dépasser sur un segment un peu raide. A ce moment, je n’ai pas la moindre idée de mon classement. D’ailleurs, celui-ci ne va pas bouger du tout… car la jeune femme en rouge me double à nouveau dès que le parcours devient plus roulant. Elle est bien plus rapide que moi sur le plat, et je n’arrive pas à la suivre.
J’arrive enfin au premier ravitaillement, après 16 kilomètres de course. J’avale deux grands gobelets d’eau fraîche, un petit bout de pastèque et un TUC. Les stands sont remplis de bonnes choses et c’est dur de ne pas s’attarder ! Mais je suis au coude à coude avec l’autre fille, et je ne veux pas abandonner la bataille si facilement. Oui, je joue un peu la compétition… Cela me motive, surtout dans les passages difficiles.
D’ailleurs, cette deuxième partie de course s’avère plus compliquée. Après le passage des belles cascades Langouette, je commence à fatiguer. J’ai déjà parcouru plus de 20 kilomètres, mais je sens que la forme n’est pas au rendez-vous. Je traverse un long passage à vide, pendant lequel j’ai l’impression de trainer deux gros boulets à mes pieds. Je suis même toute seule pendant de longs kilomètres. Heureusement que le parcours est bien balisé.
Pour m’occuper, je sors mon téléphone et j’essaie de faire une petite story pour Instagram. C’est dur, bien plus dur que pour le Trail des Volcans. Comme quoi, d’une course à l’autre, les sensations peuvent être très différentes. Je sers les dents et je pense au prochain ravitaillement. A un moment, je croise un bénévole qui me crie que je suis la sixième femme. C’est une énorme surprise pour moi, et cela me met du baume au cœur.
Après 26 kilomètres, le deuxième ravitaillement est enfin là. Je choisis de remplir ma poche à eau, qui s’est bien vidée. Mes jambes pleurent en repartant, mais il faut bien continuer. Juste devant moi, j’aperçois une autre féminine – moi qui pensais terminer ce trail toute seule ! Je la garde en ligne de mire pendant un kilomètre, puis je parviens à la doubler en montée. Serais-je donc cinquième ? Je me murmure des messages d’encouragements, car la fin de la course se jouera au mental.
Je peine à maintenir mon allure et je n’arrive même plus à descendre correctement. Mes doigts de pied tapent les chaussures à chaque pas et cela devient si douloureux que je dois modifier ma foulée. J’ai également mal aux cuisses et je maintiens péniblement une allure de 6′-6’30/km sur le plat. Mes pensées s’évadent afin de me faire oublier les douleurs. Je regarde ma montre régulièrement et je compte les kilomètres pour passer le temps. De temps en temps, je croise un trailer ou bien je me fais dépasser. Mais globalement, les jeux sont faits.
A environ deux kilomètres de l’arrivée, j’aperçois une autre femme. Elle a l’air de souffrir aussi. Elle s’accroche, mais je parviens à la doubler. Je commence à entrevoir la fin ! Une longue descente m’attend, et je sais que le village d’arrivée est en bas. J’accélère doucement, tout en restant dans ma zone de confort. Plus qu’un kilomètre…
D’un coup, j’entends des bruits de pas qui se rapprochent. Je tourne la tête et j’aperçois la jeune femme que j’avais doublée il y a 8 kilomètres. Elle me dépasse à toute allure et semble bien déterminée à prendre ma place. Mon esprit de compétition prend le relais. Je vais pas me faire coiffer au poteau si près du but ! J’accélère autant que possible et parviens à la doubler à nouveau. Elle me talonne. Nous descendons le dernier chemin à une allure folle avant de rejoindre le dernier segment de route. Je n’arrive pas à estimer la distance qui me sépare de l’arrivée.
Je me sens mal, je laisse mes dernières forces dans la bataille et je désespère de voir l’arche arriver. Ma montre sonne le 35 ème kilomètre. Je ne la regarde même pas. Enfin, la ligne d’arrivée se dessine. Le commentateur a repéré notre bataille pour la 4ème place et nous encourage dans son micro. Des étoiles commencent à voiler mon regard.
A 200 mètres du but, ma concurrente parvient à donner un dernier coup d’accélération. D’où lui vient cette énergie ? Nous courons à 16 km/h, après plus de 4 heures d’effort. Je tente de suivre, mais mes cuisses ne répondent plus et je suis obligée de la laisser s’éloigner. Je passe la ligne d’arrivée trois secondes après elle, épuisée.
Incapable de rester debout, je me laisse tomber sur l’herbe. Une bénévole vient m’apporter son aide, et garde mes jambes en l’air quelques instants. J’arrive enfin à reprendre mon souffle et à me relever. Nous échangeons une poignée de mains sincère avec l’autre coureuse. Quel finish incroyable ! Je suis bien sûr un peu déçue d’avoir fini si près du but… Mais arriver 5 ème est déjà tellement dingue !
Épilogue
Je garderai un très bon souvenir de ce trail. Le parcours est très beau, plutôt abordable et pas du tout monotone. Ma course n’a pas été très fluide et je me suis vraiment demandé ce que je faisais là à plusieurs reprises… Mais c’est aussi ce que je recherche avec le trail : repousser mes limites, défier mon mental, ignorer les douleurs. Un mois après, j’oublie d’ailleurs tous les passages difficiles pour me rappeler des émotions intenses qui m’ont étreinte ce jour là.
J’ai aussi vu dans cette petite course une occasion inespérée de passer en tête de classement. Avec mon petit niveau, cela n’a aucune chance d’arriver sur des courses avec plus d’envergure. Pourtant, être récompensée de sa performance, qui plus est en trail, permet de se sentir un tout petit plus légitime. Il y a quelques années, le trail était pour moi une discipline réservée aux meilleurs. Je me rends compte que ce n’est pas le cas, au contraire ! Et puis cela me laisse de beaux souvenirs – et une envie de prendre ma revanche l’année prochaine !
Margaux Lifestyle
Félicitations pour cette magnifique 5ème place !!!!! Belle course !
Rhapsody in Green
Merci Margaux !
Myrtilla
Wow la 5e place !! T’as assuré quand même !! Je suis incapable d’atteindre la vitesse de ton sprint final que t’avais dit sur Instagram même sur du plat et sans tous ces km derrière moi ahaha il faut vraiment que je me fasse violence à ce niveau, j’ai le cardio qui s’emballe vite ! Encore bravo en tous cas ! 😀
Rhapsody in Green
Merci beaucoup ^^
C’était un peu violent cette arrivée lol. J’ai aussi le cardio qui s’emballe vite, mais j’ai beaucoup progressé grâce aux entraînements. Courage !
Elise
Mega en retard mais bravo pour ton classement ! Très beau compte rendu, c’est toujours un plaisir de lire tes récits de course.
Rhapsody in Green
Même en retard, cela fait toujours super plaisir ! Bisous !